Dans le précédent texte, nous avions mentionné que la plupart des pays de la planète avaient opté pour la stratégie de confinement, sauf quelques-uns qui avaient préféré la stratégie d’immunité collective, laquelle a été d’ailleurs abandonnée par la la suite, à l’exception de la Suède. Dans les faits, la stratégie de confinement avait été choisie afin d’aplatir la fameuse courbe (pic épidémique), de façon à ne pas engorger les hôpitaux, minimiser le nombre de décès et s’assurer de la disponibilité du personnel et des équipements médicaux requis en période critique. 
Quant au Québec, où la population est confinée et l’économie mise sur « pause » depuis la mi-mars 2020, et ce, à l’exception des services essentiels, cette province va probablement traverser la première vague de la COVID-19 sans trop de difficultés à l’exception de situations pénibles vécues dans certaines résidences pour personnes âgées, notamment dans les CHSLD.
Durant cette première vague, le Québec aura été l’un des endroits les plus performants du monde occidental. De plus, contrairement à la quasi-totalité des pays qui ont eu à combattre ce virus, le Québec n’a utilisé qu’une partie de son arsenal, principalement en raison du faible nombre de patients hospitalisés en soins intensifs.
En date du 13 avril 2020, on peut affirmer que le Québec est sur le point d’atteindre le fameux pic épidémique (courbe aplanie) et seulement quelque 800 lits hospitaliers sont occupés, alors que 7 000 à 8 000 demeurent libres. Nous n’avons également pas eu recours à tout le personnel médical pouvant être affecté à la lutte contre la COVID-19, incluant les retraités du réseau de la santé. Finalement, le matériel médical (respirateurs, masques, blouses, etc.) a été, à quelques exceptions près, disponible pour répondre aux besoins essentiels.
À titre d’information complémentaire, soulignons que le budget de la santé et des services sociaux représentait 44 % (45,4 G $) du budget total du Québec en 2019. Ce pourcentage devrait se rapprocher de 50 % lorsque le gouvernement du Québec aura mis en place de nouvelles mesures pour améliorer les services aux personnes âgées et accroître l’autonomie provinciale en matière d’approvisionnement médical.
Alternatives
Deux alternatives nous apparaissent se présenter à nos dirigeants politiques, si la COVID-19 ne parvient pas à être contrôlée.
Première alternative
Advenant qu’un antivirus ne soit pas découvert d’ici l’automne 2020 et qu’une seconde vague de la COVID-19 se pointe le nez avant que nous n’atteignions notre immunité collective, le gouvernement du Québec n’aura pas le choix de réintroduire les mêmes mesures (confinement, soutien financier aux travailleurs et aux employeurs …) que celles mises en application lors de la première vague. Si tel est le cas, nous n’osons imaginer la situation qui prévaudra, surtout en ce qui a trait au confinement!
Note : « L'immunité collective (ou grégaire) est le phénomène par lequel la propagation d'une maladie contagieuse peut être enrayée dans une population lorsqu'une certaine proportion des individus est immunisée parce qu'ils ont développé des anticorps après avoir été contaminés ou vaccinés. »
Seconde alternative
Le gouvernement essaie, tout en imposant des mesures sécuritaires, d’amener la population à atteindre un niveau d’immunité collective élevé au cours de l’été afin qu’une bonne partie de la population soit protégée contre la COVID-19 avant l’automne. Cela ne semble pas être l’option privilégiée présentement, mais si cela l’était, pour ce faire, le gouvernement devrait sans doute mettre en place une politique de déconfinement beaucoup plus agressive que celle actuellement prévue. Différents motifs, dont quelques-uns sont énumérés ci-dessous, pourraient justifier une telle approche.
Informations générales sur l’immunité collective
De nombreux spécialistes s’entendent pour dire que l’immunité collective est le seul moyen qui existe pour enrayer l’épidémie de la COVID-19, à l’exception d’un antivirus. À cet égard, le temps requis pour développer un vaccin efficace semble toujours être de l’ordre de 12 à 18 mois, et ce, après quelques mois consacrés à des recherches intensives par tous les scientifiques du monde.
Le Québec est probablement l’un des rares endroits au monde où seulement une partie des ressources humaines et médicales ont été utilisées jusqu’à présent. De nouvelles avenues sont à l’étude (recours aux retraités, hébergement du personnel médical et confinement de travailleurs dans des hôtels, adaptation des processus de production en milieu industriel afin de répondre aux besoins en soins médicaux, etc. … ).
État de la situation concernant les personnes âgées
Peu importe la stratégie retenue, afin d’assurer la sécurité des personnes les plus vulnérables, notamment celle des personnes âgées, ces dernières devront continuer à demeurer confinées en centre d’hébergement ou chez eux à moins que la COVID-19 ne s’estompe par elle-même. À ce propos, les mesures des derniers jours mises en place par le gouvernement concernant le transfert temporaire d’une partie du personnel travaillant dans les hôpitaux vers des centres d’hébergement de personnes âgées s’inscrivent en ce sens.
Toute l’expérience acquise par le personnel médical au cours du dernier mois est un gage de succès. De plus, les contacts établis avec des entreprises, dont plusieurs québécoises, contribueront, le cas échéant, à améliorer l’approvisionnement en matériel médical lors d’une seconde crise.
De nouveaux médicaments ou traitements qui allégeront les souffrances des personnes hospitalisées et des personnes en soins intensifs, en plus de limiter le nombre de décès, sont susceptibles de devenir disponibles avant l’amorce de la deuxième vague de la COVID-19.
Toutes ces mesures prises pour assurer la sécurité des aînés et l’expérience acquise par le personnel médical ainsi que par la population en général au cours de la première vague de la COVID-19 devraient permettre d’aplanir ou d’adoucir toute courbe future de contagion.
Statistiques
Les statistiques, au 13 avril 2020, nous indiquent que le pourcentage des personnes confirmées positives représente :
- 22,2 % des cas dans la strate des 0 à 29 ans;
- 32,5 % des cas dans la strate des 30 à 49 ans.
Par ailleurs, le nombre de décès se répartit comme suit : 
- 0 à 30 ans : 0;
- 30 à 40 ans : 0,6 %, soit 2 personnes sur 360, dont l’une avait des problèmes de surpoids;
- 50 à 69 ans : 10 %, soit 36 personnes dont nous ne connaissons pas l’état de santé avant leur décès;
- 70 ans et plus : 89,5 %;.
Ces chiffres sont très éloquents si l’on considère, selon l'Institut national de santé publique (INSPQ), qu’une partie de la population était, au même moment, au travail et qu’une autre était asymptomatique, contribuant ainsi à propager le virus sans contrainte et rapidement.
Économie du Québec
La population pourrait sortir de son confinement et reprendre une vie quasi normale à la condition de respecter :
- une politique de confinement stricte pour tous nos aînés ainsi qu’une politique de déconfinement plus agressive, telle la rentrée scolaire pour tous ou l’ouverture de la majorité des commerces;
- des mesures de distanciation impliquant l’interdiction de rassemblements au-dessus d’un certain nombre de personnes.
De plus, après une pause de 5 à 6 semaines, une reprise des activités économiques serait la bienvenue, notamment pour toutes les entreprises qui œuvrent dans le secteur des services, tels les restaurants, les commerces de détail, les salons de coiffure, etc. À ce propos, n’oublions pas que le secteur de la consommation représente environ 60 % du PIB québécois.
Ce déconfinement agressif et cette reprise rapide de l’activité économique auraient également des répercussions positives sur la santé physique et mentale de tous les gens déjà confinés depuis plusieurs semaines. D’autres bienfaits, impossibles à identifier présentement, seraient susceptibles d’apparaître.
Période automnale
Que se passera-t-il à l’automne si les scientifiques n’ont pas découvert d’antivirus et que la seconde vague de la COVID-19 se présente à nos portes dans un contexte où nous aurions atteint un niveau élevé d’immunité collective?
Eh bien, si l’immunité collective remplit son rôle comme mesure protectrice préconisée par certains scientifiques, une bonne partie de la population sera immunisée, donc capable de résister à ce virus. Si c’est le cas, le déconfinement quasi total de la population du Québec aura rempli son rôle. Les entreprises poursuivront leurs opérations, les gens continueront à travailler, et surtout les personnes âgées pourront sortir de leur confinement après un printemps et un été coupés de tout contact avec leurs proches.
Trois questions cruciales s’imposent alors :
- Pourrons-nous obtenir l'immunité collective sans un déconfinement agressif?
- Est-ce que notre système de santé sera en mesure de répondre aux conséquences associées à un déconfinement agressif?
- Quel en sera le coût en vies humaines?
Difficile de répondre à ces questions, mais une chose est certaine, dans un contexte d’immunité collective faible, de multiples effets néfastes affecteront la santé des Québécois, surtout si la COVID-19 mute au cours d’une deuxième vague. Diverses mesures de confinement reviendront et l’économie plongera dans une récession profonde.
Conclusion
Lors de l’arrivée de la première vague de la COVID-19 au Québec, nos leaders gouvernementaux ont opté, dans un premier temps, pour la stratégie optimale permettant de limiter les dégâts, soit le confinement. Toutefois, comme la découverte d’un vaccin ne peut que survenir tardivement, la seconde alternative, à savoir, l’immunité collective, devrait sûrement être privilégiée avant que la COVID-19 ne pointe de nouveau son nez. En effet, l’arrivée d’une seconde vague de la COVID-19 en mutation pourrait s’avérer beaucoup plus néfaste et difficile à gérer que la première vague, comme cela fut le cas lors de la grippe espagnole en 1918-1920.
En résumé, la voie de l’immunité collective nous apparaît toute tracée pour faire face à une deuxième vague de la COVID-19 susceptible de survenir à l’automne ou à l’hiver, et enrayer cette pandémie au Québec compte tenu :
- de l’expérience acquise par le personnel médical et par la population lors de la première vague de la COVID-19;
- de la qualité exceptionnelle des services de santé au Québec tant sur le plan du personnel que des équipements;
- des résultats encourageants obtenus en matière de décès, notamment, chez les 0 à 49 ans, et ce, malgré qu’une partie de la population était au travail ou asymptomatique lors du premier confinement;
- des bénéfices qui résulteront d’une isolation continue et stricte des résidents logeant dans les centres d‘hébergement de personnes âgées;
- de la nécessité d’une reprise de l’économie qui ne tarderait pas trop.
Finalement, soulignons que la position géographique du Québec, quasi isolé au nord-est de l’Amérique du Nord, est également un gage de succès, puisque sa situation géographique lui facilite beaucoup la tâche, eu égard à la surveillance de ses frontières.